mardi 4 décembre 2012

Les salariés dans le « saint des saints »


C’est le titre de l’excellent article publié dans Paris-Match du 29 novembre dernier  dans lequel Anne-Marie LECHEVALLIER  traite de la possibilité pour les salariés de siéger au conseil d’administration de leur entreprise.

Ce sujet est particulièrement d’actualité depuis la publication du rapport de Louis GALLOIS sur la compétitivité qui préconise, entre autres, la présence de quatre salariés au sein des conseils d’administration des entreprises.
Cette mesure n’est pas totalement nouvelle puisque une loi de 1983 l’obligeait déjà dans les entreprises publiques et que seize des quarante entreprises du CAC 40 ont déjà choisi d’avoir des administrateurs salariés dans leur conseil d’administration ;  mais là, çà deviendrait obligatoire de par la loi.

Le premier Ministre Jean-Marc AYRAULT a eu la bonne idée de retenir cette préconisation dans son pacte de compétitivité en imposant non pas quatre – comme le disait le rapport GALLLOIS – mais deux salariés et pour les entreprises de plus de 5 000 personnes. On peut cependant saluer cette décision comme un très petit pas mais dans une bonne direction, celle de l’égalité de pouvoir entre les actionnaires et les salariés dans les entreprises.

Pierre-Yves GOMEZ – Directeur de l’Institut français du gouvernement des entreprises – cité dans cet article, constate que « alors que la droite promeut l’actionnariat salarié, la gauche propose aux salariés de se réapproprier le pouvoir ». Le « réapproprier » me semble de trop parce que, à ma connaissance, les salariés n’ont jamais eu le pouvoir dans l’entreprise !

Ce qui a inspiré Louis GALLOIS et Jean-Marc AYRAULT, c’est peut-être le constat fait par tous  de la différence entre les entreprises françaises et les entreprises allemandes dans lesquelles les salariés sont beaucoup plus impliqués dans la performances économique de l’entreprise et par là-même prêts à faire les efforts nécessaires, grâce entre autres, à la cogestion (cf. billet n°35 de ce blog )

Le moins qu’on puisse dire est que cette mesure, par sa timidité (les salariés ne sont qu’alibi),  n’atteint pas son but d’un meilleur partenariat entre les actionnaires et les salariés. Anne-Marie CHEVALLIER rappelle le moment où six administrateurs salariés chez Aéroport de Paris ont claqué la porte du conseil d’administration faute de pouvoir peser sur les votes.

Quand comprendrons-nous que les salariés doivent avoir un véritable pouvoir de décision dans l’ entreprise ? (cf. billet n° 1 de ce blog). François CHEREQUE a peut-être raison lorsqu’il nous dit que « la France n’est pas assez mûre pour la codétermination ». A nous de le faire mentir !

jeudi 20 septembre 2012

Du grand soir aux petites touches




Depuis son élection, la côte de François Hollande est en forte baisse, signe d'une grande déception de son électorat.

Beaucoup rêvaient d'un changement radical, du « grand soir » : fin du capitalisme, garantie de l'emploi, élévation du niveau de vie etc. Mais ils ont du mal à comprendre que ce « grand soir » ne peut venir.
Il ne peut venir tout simplement parce que toutes les économies sont imbriquées et qu'il est difficile de sortir du système marchand dans lequel nous vivons - d'autant plus qu'il n'y a pas d'autres modèles, le système capitaliste étant devenu une référence même en Chine et en Russie !
Nous ne sommes pas seuls au monde ; pouvons-nous imaginer un seul instant que la France décide de revenir à l'heure d'hiver sans l'accord de ses partenaires européens !
Et même si ce « grand soir » arrivait, nous passerions par une période de vaches maigres difficile à vivre pour tous les français : baisse du pouvoir d'achat, augmentation du chômage... cf. billet n° 5 « Le piège à guêpes »

C'est donc de l'intérieur, par petites touches et avec beaucoup de patience qu'il faut agir pour refonder le capitalisme.
Plusieurs mesures iraient dans ce sens-là :

* la réforme fiscale promise par François Hollande
* la taxation des transactions financières ( cf. Billet n°124 « La taxe Tobin »)
* la limitation des licenciements pour les entreprises qui investissent
* la réduction de la publicité à la TV, et pas uniquement sur les chaînes publiques (cf. Billet n° 6 « La publicité, un outil à utiliser avec modération »)
* l'interdiction pour les entreprises d'avoir un budget publicitaire au-delà de 1% de leur chiffre d'affaires ; en cas de dépassement les frais de publicité seraient pris en compte dans les bénéfices et non plus dans les dépenses
* la suppression de la publicité pour tous les jeux et l'augmentation de leur taxe (cf. billet n° 16 « Jeux d'argent : à l'école du capitalisme »)
* la notation annuelle du PDG pour les entreprises de plus de 300 personnes et, en cas de non moyenne, majoration du taux d'imposition (cf. Billet n° 1 « Le patron noté et élu par ses salariés »

Après cinq mois de pouvoir je doute fort que le gouvernement de François Hollande s'engage sur ces petites touches faute d'un projet de société à long terme, d'une vraie volonté de changement et d'une rupture effective avec le capitalisme actuel.


mercredi 13 juin 2012

Le pourquoi et le comment

Je participais récemment à une table ronde sur le thème de la qualité de vie au travail. Nous étions quatre intervenants : un chef d’entreprise, une consultante en management, une consultante en développement durable et moi-même. Cela se passait dans une grande Ecole de Formation Continue et le public se composait essentiellement de professionnels des Ressources Humaines, de cadres et de dirigeants. Chaque intervenant a tour à tour donné sa vision sur la qualité de vie au travail.

Pour ma part, j’ai parlé de l’évolution du salarié qui est passé du besoin d’avoir au besoin d’être et de son besoin de reconnaissance auquel l’entreprise doit répondre à la fois par une meilleure information et à la fois par l’implication du salarié aux décisions concernant ses conditions de travail. Tout naturellement, j’ai aussi parlé de mon expérience de patron noté et élu par ses salariés (cf. billet n° 1 de ce Blog) et de la place à donner à la démocratie dans l’entreprise pour que chaque salarié devienne un citoyen économique. Mais j’ai très vite compris que la majorité du public « décrochait » et que je n’étais pas sur la même longueur d’onde  que mes collègues intervenants ; je faisais figure d’ « ovni » voire d’extra terrestre. Cette situation plutôt inconfortable pour moi m’a remis en question et poussé à en chercher les causes : avais-je été maladroit ou trop passionné dans mon exposé ? En fait, la réponse est beaucoup plus simple : mes collègues intervenants étaient dans le « comment »  et  j’étais dans le « pourquoi » ; ils apportaient des recettes pour combattre le stress, pour une meilleure motivation… mais ne se posaient pas la question de fond du pourquoi de l’entreprise et de sa finalité. Et paradoxalement c’est en se posant cette question de fond qu’on trouvera les solutions du « comment ».

Dans les Ecoles de commerce, en effet, on apprend comment gagner de l’argent, comment bien gérer une entreprise, comment motiver son personnel, comment mieux vendre son produit ou son service, comment mettre en place le Développement Durable … Mais on n’apprend jamais pourquoi l’entreprise, pourquoi le système capitaliste, pourquoi un bon management, pourquoi le Développement Durable… Et pourtant, c’est le « pourquoi » qui donne du Sens et définit la finalité de toutes choses. Je comprends mieux maintenant pourquoi je peux paraître un « ovni » lorsque je parle de la finalité sociétale de l’entreprise. Or, c’est bien le « pourquoi » qui conditionne les moyens et remet en question. Un exemple très simple : pourquoi les jeux olympiques ? La plupart répondent pour le sport, la politique, l’économie… Mais si l’on a compris que dans l’esprit de Pierre de Coubertin la finalité des JO était de rassembler les hommes, alors le « comment » devient différent.

Nous sommes dans une société du « comment » ce qui explique la multitude de consultants. Le « comment » fait appel à notre intelligence rationnelle, le « pourquoi » interpelle notre conscience et notre intelligence du cœur en même temps qu’il libère l’homme de sa condition animale. C’est l’Ethique éclairée.



mardi 15 mai 2012

Le temps de l’action

Chers lecteurs,

Je voudrais vous remercier de votre fidélité dans la lecture de ce Blog. Pendant plus de trois ans je vous ai invités à réfléchir à ce que pouvait être la démocratie dans l’entreprise et à ses bienfaits. C’était le temps de la réflexion.
Le moment est venu de passer à l’action. Cette période est propice parce que notre pays vient de changer de Président et qu’à priori il sera plus enclin que son prédécesseur à accepter l’idée de démocratie dans l’entreprise. J’invite donc tous ceux qui se sentent concernés par ce souci de citoyenneté économique à mettre en œuvre les moyens de faire pression sur ce nouveau gouvernement : pétitions, courriers, contacts personnels auprès d’élus influents, constitution d’une association voire d'un parti politique…. Toutes les idées seront les bienvenues. Chers lecteurs, la balle est dans votre camp ! Je reste à votre disposition pour m’associer à toute initiative. Je donne l’exemple en envoyant ce jour à François Hollande une lettre dont le texte suit.

Monsieur le Président,

Pendant la campagne électorale vous avez dit que votre adversaire était la finance et qu’il fallait la combattre. Je suis tout à fait en accord avec vous pour lutter contre le pouvoir de la finance. Pour ceci, j’ai identifié trois niveaux.
Le premier, celui des actionnaires et des propriétaires.
Des mesures sont déjà en place telle l’ISF et bientôt une tranche à 75%. Remarquons que cette mesure est limitée car elle ne concerne pas les français vivant à l’étranger et encore moins les étrangers.
Le deuxième, celui de la Bourse.
Il serait bien que ce projet de taxe sur les transactions financières puisse rapidement être opérationnel.
Le troisième, celui de l’entreprise.
On en parle malheureusement peu et c’est pourtant au niveau de l’entreprise que le pouvoir de la finance fait le plus de dégâts (licenciements et délocalisations abusifs, mauvaises conditions de travail, etc. etc.).
Monsieur le Président, je vous propose donc d’agir pour limiter ce pouvoir démesuré presque indécent des actionnaires et pour ce faire de mettre en place la démocratie dans l’entreprise qui suppose l’égalité de droits et de devoirs entre les actionnaires et les salariés ; que ces derniers ne soient plus sujets mais citoyens dans l’entreprise. Un beau dessein pour la promotion et la dignité de l’homme. La démocratie, je l’ai vécue pendant plus de vingt ans dans ma propre entreprise. Je voudrais vous en témoigner et vous dire comment on peut l’appliquer dans les grandes entreprises. C’est pourquoi je vous sollicite un rendez-vous.
Dans l’espoir que vous donniez suite à ma demande, je vous adresse mes salutations les plus respectueuses et toutes mes félicitations pour votre brillante élection.

mardi 24 avril 2012

L'entreprise France

Ce dimanche 22 avril 2012 plus de 34 millions de français (soit 80%) se sont déplacés pour voter et élire le Président de la République. Rendons hommage à ces millions de personnes qui, pour certaines, ont sacrifié un week-end voire leurs vacances pour accomplir leur devoir de citoyen. Même si une voix prise en elle-même a peu d’importance par rapport aux millions d’autres, reconnaissons que c’est une satisfaction intense de pouvoir participer et être citoyen dans le pays dans lequel nous vivons.
Certains ont voté en fonction de leur famille politique, d’autres du capital sympathie que dégage le candidat, d’autres pour des raisons d’intérêt personnel, d’autres pour éliminer un candidat, d’autres sur le programme ou pour mille autres raisons… mais tous de bonne foi. Cependant, qu’on le veuille ou non, il est difficile d’avoir un jugement juste. Pour ce faire il faudrait avoir la maîtrise de tous les problèmes à la fois (éducation, armée, politique étrangère, social…). Et çà, personne ne l’a, pas même le Président de la République ! Va-t-on pour autant remettre en question le suffrage universel, la démocratie ? 

Certains lient la démocratie à la démagogie mais à la lecture des programmes on s’aperçoit qu’on nous promettaient beaucoup, entre autres Nathalie ARTHAUD l’interdiction des licenciements, Jacques CHEMINADE des classes de 15 à 25 élèves maximum, Nicolas DUPONT-AIGNAN la suppression des péages sur les autoroutes déjà amorties, Philippe POUTOU le SMIC à 1 700 € nets et la retraite à 60 ans … Et compte tenu de toutes ces promesses plutôt alléchantes, Nathalie ARTHAUD n’a obtenu que 0,58%, Jacques CHEMINADE 0,25%, Nicolas DUPONT-AIGNAN 1,81%, Philippe POUTOU 1,17%. On peut donc conclure que l’électeur est bien plus responsable qu’on veut bien nous le faire croire et qu’il sait peser le pour et le contre. Ce qui est valable pour l’entreprise France l’est aussi pour n’importe quelle entreprise. Pourquoi, au moins une fois tous les cinq ans, les salariés ne pourraient-ils pas élire leur patron avec un droit de vote équivalent à celui des actionnaires ? cf. billet n°1 http://refondationducapitalisme.blogspot.fr/2009_04_01_archive.html 

Certes, quel que soit le système, les risques d’erreur sont importants ; mais ne sont-ils pas les mêmes au sein d’un conseil d’administration où il y a souvent des clans chez les actionnaires qui font que le choix du patron n’est pas toujours le plus judicieux ?

Certains mettent en avant que les salariés n’ont peut-être pas les connaissances requises pour choisir leur patron ; faut-il donc en conclure que le salarié actionnaire chez Auchan ou Bouygues est plus intelligent que le salarié travaillant dans une entreprise ne pratiquant pas l’actionnariat ? Non ! Il n’est pas plus intelligent mais tout simplement plus responsable sans compter que la démocratie dans l’entreprise oblige à une meilleure information et communication.

D’autres évoquent le risque de démagogie dans l’entreprise. Mais, dans ce cas, il est pratiquement inexistant parce que l’élection d’un chef d’entreprise n’entraîne pas les mêmes conséquences directes que l’élection d’un homme politique : là, il en va de son emploi, de son salaire et même quelques fois de la survie de l’entreprise. De plus, ce type d’élection donnerait priorité à un homme de communication.

Mais au fait, qu’attend-on au juste d’un chef d’entreprise aujourd’hui ? Des compétences techniques ? Il y pour cela des ingénieurs et certainement plus compétents… Un génie marketing ? Il y a pour cela – à l’intérieur comme à l’extérieur de l’entreprise – des personnes qui ont ce génie. Le profil du chef d’entreprise des années à venir sera à n’en pas douter celui d’un guide qui rassemble les hommes, d’un homme de sagesse qui a le souci de préserver les intérêts de tous sans privilégier ceux de certains, donc un homme de communication et non pas un manipulateur.

Quand on sait que la motivation des hommes fera plus tard la différence dans la compétition économique, la démocratie dans l’entreprise est devenue une urgence non plus seulement pour des raisons de dignité mais aussi de performance.

mardi 17 avril 2012

D’une dictature à l’autre

Comme beaucoup de gens j’ai suivi « Des paroles et des actes » , cette émission télé parallèle à la campagne officielle, où chaque candidat à la présidentielle a eu pendant quinze minutes une nouvelle opportunité de mieux se faire connaître et de présenter son programme. On a plus particulièrement découvert ceux qu’on appelle les « petits candidats »  (Nathalie Arthaud, Jean-Claude Cheminade, Nicolas Dupont-Aignan, Philippe Poutou) et même si leur programme a été loin d’être convaincant, certains ont séduit par leur sympathie et leur sincérité – je pense tout spécialement à Philippe Poutou. On a pu constater que chaque candidat avait le souci du bonheur des français, sa part de vérité, dénonçait la dérive financière mais avait sa propre réponse. Dans ce domaine, c’est peut-être Nathalie Artaud qui a été la plus radicale pour ne pas dire agressive : elle a dénoncé la dictature des patrons et proposé la dictature du prolétariat.

Mais pourquoi faut-il passer d’un extrême à l’autre ? Pourquoi n’y aurait-il pas un juste milieu entre le pouvoir des patrons et le pouvoir des salariés ? Pourquoi faut-il qu’on soit systématiquement dans l’agression de l’autre ? Dans le bien ou le mal ? Pourquoi ne pas proposer un système économique où il y aurait égalité de pouvoir entre les salariés et les patrons ?

C’est ce que j’ai fait pendant plus de vingt ans dans mon entreprise. La pierre angulaire de cette égalité de pouvoir passait par l’élection du patron par une assemblée composée pour moitié de tous les salariés qui avaient chacun une voix et pour moitié des actionnaires qui avaient autant de voix que les salariés mais, à la différence des salariés, des voix proportionnelles à leur apport en capital http://refondationducapitalisme.blogspot.fr/2009/04/le-patron-note-et-elu-par-ses-salaries.html ; j’ai en effet voulu respecter la hiérarchie des actionnaires car je pense qu’une personne qui a 30% ou 40% du capital doit avoir un droit de regard plus important que celle qui en a 1%. Pour être élu, il fallait une majorité des ¾ des voix ce qui suppose l’adhésion des deux partenaires principaux de l’entreprise. Cette élection était assortie de procédures garantissant l’égalité de pouvoir entre les actionnaires et les salariés. Entre autres règles, je m’étais fixé celle de ne pas vendre plus de 10% de mes actions sans l’accord du personnel. Pour l’information du personnel, j’avais mis en place des conseils de gestion dans lesquels on pouvait débattre des résultats de l’entreprise, de son organisation, des investissements, des salaires… Chaque sujet débattu était suivi d’un vote mais seulement consultatif ; je n’étais pas obligé de tenir compte de ce vote. Tenant la légitimité de mon autorité d’un mandat donné par les deux partenaires de l’entreprise, entre autres, les salariés, éthiquement, cela ne me dérangeait pas ; de plus, cela me permettait d’avoir davantage de souplesse dans la gestion de l’entreprise.

Ce système ne peut être fiable que dans une moyenne ou grande entreprise puisque la pierre angulaire en est la remise en question du patron : difficile de remettre en question le patron d’une petite entreprise sans remettre en question l’entreprise elle-même. Par contre, on pourrait bien imaginer que dans une grande entreprise les actionnaires désignent le patron et que ce choix soit validé sous forme de référendum par tous les salariés. Peu importe la forme, l’important c’est une égalité de pouvoir entre les actionnaires et les salariés.

Dommage que personne n’en parle dans cette élection présidentielle ! On va d’un excès à l’autre : on passe de la dictature financière – que nous connaissons aujourd’hui - à la dictature salariale – solution totalement utopique ; on banalise la confrontation dans l’entreprise alors qu’on attend des hommes politiques les réponses pour que chacun soit mieux au travail  et grandisse en responsabilité et en dignité.




mardi 10 avril 2012

Sauve qui peut



«Sauve qui peut» c’est le titre de l’excellent reportage sur l’entreprise DESCAMPS diffusé le 03 avril sur France 2 http://www.pluzz.fr/sauve-qui-peut-2012-04-03-22h50.html.
Dans ce documentaire Clarisse FELETIN nous fait vivre l’agonie de la maison DESCAMPS qui a été le fleuron français de l’industrie textile et le dernier fabriquant des serviettes éponges en France.
On assiste au dépôt de bilan du 26 juin 2010 qui a été précédé de plans sociaux à répétition et de la fermeture de quatre usines du Groupe, toutes délocalisées en Asie. Au moment du dépôt de bilan, il reste 100 personnes inquiètes à l’usine de Régny dans la Loire.
Comme il se doit, c’est le Tribunal de Commerce – en l’occurrence celui de Paris – qui va statuer sur le sort de l’entreprise DESCAMPS et attendre des appels d’offres de reprise.

Trois offres paraissent sérieuses.

Un plan de continuation (le repreneur s’engage à payer tous les fournisseurs et souvent achète l’entreprise pour un euro symbolique).
Il est proposé par Matéo ZUCCHI, l’un des représentants de la dynastie italienne du même nom (leader européen du linge de maison), actionnaire de l’entreprise DESCAMPS. Ce plan de continuation verrait la venue d’un nouveau partenaire,  le Groupe « Astrance Capital » dont Pascal LAUFFER est Président et qui, dans un premier temps, limiterait les licenciements à 38 personnes.

Un plan de cession (le repreneur achète l’actif mais n’a plus à payer le passif et entre autres les fournisseurs).
Cette offre est faite par « Maison de la Literie » leader français du lit qui a un réseau très étoffé de magasins et dont le PDG Fondateur Pierre ELMALEK s’engage à garder tout le personnel et à développer l’activité.
Cette offre satisfait tellement les salariés de DESCAMPS qu’elle leur arrache un « trop beau pour être vrai » !

Un nouveau plan de cession, proposé par le Baron PETIET Président de « Krief  Group » qui a pour seul souci de profiter de la notoriété de la marque DESCAMPS et délocaliser la production en Chine pour en faire le leader mondial dans son domaine d’activité.

A ce moment du reportage on pense que tout est clair et que « Maison de la Literie » sera désignée par le Tribunal de Paris pour reprendre la Maison DESCAMPS. Mais la famille ZUCCHI ne veut pas en rester là et, à l’étonnement du Tribunal, des Avocats et de l’Administrateur judiciaire, nomme Pascal LAUFFER à la tête du Groupe DESCAMPS qui, de ce fait, devient juge et partie : il a en effet maintenant à la fois la « casquette » du Président DESCAMPS et  la « casquette » du Président « d’Astrance Capital » qui veut reprendre DESCAMPS ! On arrive à la situation paradoxale qu’il connaît toutes les offres faites par ses concurrents et leur fait même visiter l‘usine ! Malgré ce « coup fourré » les salariés restent confiants et pensent que le Tribunal va statuer en faveur de « Maison de la Literie ». Mais, coup de théâtre ! Le Tribunal apprend que le frère du Président de « Maison de la Literie » est juge au Tribunal de Paris mais pas dans la même Chambre et, ne voulant pas risquer la critique d’un soi-disant manquement à l’Ethique, préfère lâchement se dessaisir du dossier, à la grande déception des salariés de DESCAMPS. Deux mois après, le dossier DESCAMPS est repris par le Tribunal de Bobigny : retard fort préjudiciable à sa bonne gestion car, entre temps, le passif s’est aggravé. A la stupéfaction générale et au grand désarroi des salariés, « Astrance Capital » est désigné pour reprendre l’entreprise. Les salariés très mécontents font appel de la décision du Tribunal de Bobigny mais la Chambre d’appel confirme la décision.

Résultat : 23 licenciements immédiats et 6 mois plus tard mise au chômage des ouvriers restants. Le Groupe « Astrance Capital » ne respecte pas du tout ses engagements mais la justice ne peut rien faire. Le Groupe « Astrance Capital » et le Groupe ZUCCHI vont bien, leur cours en bourse a augmenté ! Le bonheur des uns fait le malheur des autres.

Quelle leçon tirer de cette lamentable affaire ?
Si les salariés de DESCAMPS avaient eu le droit de désigner leur patron, certainement que Pascal LAUFFER ne l’aurait pas été !
Si les salariés de DESCAMPS avaient eu le droit de veto pour s’opposer à la décision du Tribunal de Bobigny, « Maison de la Literie » aurait certainement été désignée.
Mais malgré cette évidence, les syndicats de tous bords… ne veulent pas entendre parler  de démocratie dans l’entreprise et d’égalité de pouvoir entre salariés et actionnaires sous prétexte de ne pas instaurer une collaboration malsaine avec les patrons ! Combien de leçons faudra-t-il pour qu’ils comprennent enfin que la démocratie dans l’entreprise est la meilleure réponse pour faire face au pouvoir financier ?





mercredi 4 avril 2012

Mes trois piliers

On me demande souvent comment m’est venue l’idée d’instaurer la démocratie dans l’entreprise. En fait elle repose sur trois « piliers ».

Un pilier très personnel, celui de mes valeurs.
Je suis croyant et j’ai l’intime conviction que chaque homme a une dimension sacrée, qu’il a un besoin aussi fondamental que celui de respirer et de se nourrir, c’est celui  d’aimer, d’être aimé et d’être respecté ; ce qu’on peut aussi appeler la dignité. J’ai aussi l’intime conviction que l’homme est le seul être vivant libre et qu’à la différence de l’animal il a la conscience. Dans le « contrat social », Jean-Jacques Rousseau dit que renoncer à sa liberté c’est renoncer à sa qualité d’homme. En terme de management, ce besoin de respect et de dignité se concrétise par le besoin de reconnaissance. Pour satisfaire ce besoin, on informe le salarié, on le responsabilise, on le rémunère et on l’implique dans les décisions qui le concernent. Si l’on va au bout de cette logique dans le respect de la dignité du salarié, il doit être impliqué directement ou indirectement dans la stratégie de l’entreprise et dans le choix de son patron et ne plus être considéré comme un sujet voire un pion ou un moyen.

Un deuxième pilier qui est d’ordre « politique » mais n’a aucune connotation politique au sens où j’ai toujours eu un attachement et un très grand respect pour le Général de Gaulle sans pour autant adhérer à tout ce qu’il a dit ou fait et encore moins à ceux qui se réclament de lui. En 1968, le Général De Gaulle a employé un mot très fort, celui de « participation ». A l’époque je n’étais pas encore patron mais j’ai compris que derrière cette idée il y avait quelque chose d’important qui allait au-delà de la simple participation financière comme beaucoup ont voulu le comprendre… Je me disais « si un jour j’ai la chance d’être patron, j’explorerai cette « troisième voie » entre le capitalisme et le communisme ».

Un troisième pilier qui est de l’ordre du bon sens.
Dans l’entreprise, il y a deux partenaires principaux : les actionnaires qui amènent du capital et les salariés qui amènent leur travail, leurs compétences et leur génie. Ces deux partenaires sont complémentaires et indissociables. Alors, pour qu’une équipe fonctionne bien et optimise les compétences de chacun dans n’importe quel domaine, il faut qu’il y ait une estime et un respect mutuels de chaque partenaire et une égalité de droits et de devoirs. Or, aujourd’hui, cet équilibre n’est pas respecté dans l’entreprise ; il y a un partenaire « actionnaires » qui a tous pouvoirs dans l’entreprise (investir, délocaliser, licencier, recruter…) et un autre « salariés » qui fait pourtant la richesse de l’entreprise et n’a aucun pouvoir hors mis celui du code du travail et le pouvoir de violence qu’est la grève. Créons donc les conditions pour que ces deux partenaires principaux soient à égalité de droits et de devoirs dans l’entreprise.

 

mardi 27 mars 2012

Pourquoi je vais voter Hollande

Plusieurs raisons m’amènent à voter Hollande le 22 avril prochain.

La première est l’alternance : même s’il y a eu la parenthèse Jospin, depuis 17 ans la droite est au pouvoir (deux mandats de Chirac et un de Sarkozy) et je pense que - quel que soit le pays – il est souhaitable et sain qu’il y ait une alternance à la direction des affaires. Il en va de  la bonne relation sociale qu’un camp ou l’autre  ne se sente pas frustré par la monopolisation du pouvoir. De plus, je crois aux sondages et, même si Hollande n’est pas mon candidat idéal, je pense qu’il est le seul à pouvoir battre Sarkozy ; je ne voudrais pas revivre un 21 avril avec Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon en deuxième position qui réélirait Sarkozy dans un fauteuil.

La deuxième est la déception: Nicolas Sarkozy avait le souci de refonder et moraliser le capitalisme et il na pas tenu sa promesse (cf. son discours du 28.01.10 à Davos cf. billet n° 39  de ce Blog le 03.02.10) : (…) « Entendons-nous bien : il ne s’agit pas de nous demander par quoi nous allons remplacer le capitalisme mais de savoir quel capitalisme nous voulons. La crise que nous traversons n’est pas une crise du capitalisme. C’est une crise de la dénaturation du capitalisme. C’est une crise liée à la perte des valeurs et des repères qui ont toujours fondé le capitalisme (…) Le capitalisme purement financier est une dérive dont on a vu les risques qu’elle faisait courir à l’économie mondiale. Mais l’anticapitalisme est une impasse pire encore.
Nous ne sauverons le capitalisme qu’en le refondant, en le moralisant. Je sais que ce terme peut susciter beaucoup d’interrogations. De quoi avons-nous besoin au fond, sinon de règles, de principes, d’une gouvernance qui reflètent des valeurs partagées, une morale commune ? On ne peut pas gouverner le monde du XXIe siècle avec les règles et les principes du XXe siècle. On ne peut pas gouverner la mondialisation en tenant à l’écart la moitié de l’Humanité, sans l’Inde, l’Afrique, ou l’Amérique Latine… »
Depuis, sur son initiative, il y a eu cinq G20 ! A Washington, à Londres, à Pittsburgh, à Toronto, à Séoul et à Cannes. Que je sache, rien n’a changé….

La troisième ce sont les attaques personnelles : je pense que dans un débat politique digne de ce nom il ne doit pas y avoir d’attaques personnelles. Or Hollande est l’objet de ces attaques aussi bien de la part de son camp « capitaine de pédalo » (Mélenchon) que de l’opposition « on ne peut prétendre à la plus haute fonction lorsqu’on n’a pas été ministre » (Bernadette Chirac) pour ne citer que ces deux exemples. On lui fait un procès en incompétence comme il a d’ailleurs été fait à Ségolène Royal. Personnellement je préfère quelqu’un dans l’humilité que dans un orgueil démesuré.

La quatrième est le moindre mal : je ne me fais pas d’illusion. Un gouvernement de gauche n’aura pas les réponses aux problèmes sociaux que nous vivons et encore moins à la crise financière. Mais au moins  il a la volonté de changer les choses (il est contre le néo-libéralisme) et ses réponses seront meilleures sur le plan social que celles de ceux qui prônent le capitalisme pur et dur.

La cinquième est la valeur d’enseignement de l’échec : c’est par l’expérience voire l’échec de la gauche qu’on trouvera enfin les réponses à la refondation du capitalisme qui passe par la réforme de l’entreprise en faisant de chaque salarié un citoyen économique (cf. billet n° 1 de ce Blog le 23.04.09). On avait beaucoup d’espérance en François Mitterrand : il a déçu. François Hollande décevra aussi, ce que je ne souhaite pas. Mais c’est par ces échecs successifs de la gauche que nous trouverons enfin les vraies réponses.

mardi 20 mars 2012

La sagesse suisse

Ce dimanche 11 mars un évènement important s’est passé en Suisse mais qui n’a presque pas été repris par les médias français. Les Suisses, à 67%, ont voté contre un allongement des vacances de 2 semaines. Résultat déconcertant pour des français ! Que comprendre de cet événement ?

Premièrement, les Suisses ont vite saisi que ce qui leur était proposé ils allaient le payer soit par des cadences supérieures, soit par un allongement de la durée du travail ou, pire encore, au détriment de la compétitivité de leur entreprise, ce qui risquait  d’être un facteur de chômage.

Deuxièmement, les Suisses sont instruits de la logique économique et savent faire la part des choses.

Troisièmement, le citoyen suisse est considéré, comme un citoyen mature, responsable, qui a la possibilité de prendre des décisions en toute connaissance de cause.

Quatrièmement, les syndicats qui militaient pour ces deux semaines de congés supplémentaires ont été sévèrement désavoués et n’ont pas été représentatifs des attentes des salariés.

Le témoignage de Corinne, dans « Aujourd’hui en France » du 12 mars illustre tout à fait le résultat de cette votation sur les deux semaines de congé supplémentaires. « Corinne s’amuse des résultats du vote. Les Suisses ne veulent pas avoir 6 semaines de congé au lieu de 4 ? Rien d’étonnant pour cette frontalière qui travaille dans une agence de voyage à Genève. ‘Il n’y a pas eu de débat avec mes collègues, raconte-t-elle. Beaucoup de Suisses avaient peur de le payer d’une manière ou d’une autre. Et cela aurait été trop lourd pour eux’. Avec 42,5h de travail hebdomadaire, les Helvètes ont des semaines bien chargées. Du coup ‘beaucoup se sont dit que, si l’on donnait une ou deux semaines de vacances de plus, ils devraient sûrement faire plus d’heures’ argumente-t-elle. Et puis, ‘il y a aussi la compétitivité : capitale pour les Suisses. Si on leur octroie plus de congés, l’entreprise sera-t-elle encore viable ?’. Corinne avoue qu’elle se serait posé les mêmes questions si elle avait pu voter ».

Une fois de plus, la démonstration a été encore faite que si l’on considère l’homme comme un citoyen responsable, si l’on a le souci de l’informer, de faire preuve d’un minimum de pédagogie et d’un maximum de respect et d’humilité, si on lui fait confiance, les murs et les obstacles à la bonne entente entre les hommes et à la paix peuvent être facilement supprimés. Et ce qui est valable pour la Suisse l’est aussi pour la France en général et pour les entreprises en particulier. Mais pour cela, il faut mettre fin à la lutte des classes – qui subsiste toujours chez nous, qu’on le veuille ou non - dans laquelle chacun campe sur ses positions, est tour à tour agressé ou agresseur. Pas plus que les Suisses les Français ne veulent détruire leur entreprise, ou « bouffer » du patron. Comme les Suisses, ils sont capables de comprendre la logique économique mais ils ont besoin d’être considérés et reconnus ; c’est par la démocratie dans l’entreprise que nous arriverons à plus de dignité pour chacun.

mardi 13 mars 2012

Délinquance : la lettre et l’esprit



La montée de la délinquance est un véritable sujet de société. Augmentation de 5% de la petite délinquance (vol à la tire, vol à l’étalage, coups et blessures, etc.) sans compter toutes les victimes qui ne se donnent même pas la peine de faire une déclaration à la police sachant que les chances de retrouver leurs agresseurs sont nulles. Pour cette délinquance on trouve chaque jour des parades, à commencer par notre ministre de l’intérieur, Monsieur Guéant. Il en va de la qualité de notre vie et de la sécurité de nos concitoyens.

Mais il y a une autre délinquance qui ne dit pas son nom parce qu’elle ne constitue pas une entorse à la loi et qui est pourtant beaucoup plus grave : c’est l’exil fiscal. A la veille de cette élection présidentielle, on  assiste à une vague sans précédent de gens qui veulent quitter la France – patrons, sportifs, artistes... – pour protéger leur patrimoine et payer moins d’impôts. Non seulement cet exil est préjudiciable financièrement pour la France mais il nous prive de talents. Maurice Lévy, le président de l’association française des entreprises privées et de Publicis, a déclaré récemment « ce n’est pas tant l’exil des riches que je redoute,  c’est le départ des talents français porteurs d’avenir ».
Les agences immobilières et fiscales sont débordées de demandes en Suisse comme en Belgique. Si l‘on en croit l’article de Boris Cassel dans le quotidien « Aujourd’hui  en France » du 05.03.12, « après la Belgique, la Suisse est la deuxième destination la plus prisée des riches contribuables français décidant de s’exiler pour des raisons fiscales. Surtout les cantons francophones de Genève et de Vaud. ‘Il y a une forte demande actuellement confirme Philippe Kenel, célèbre avocat fiscaliste installé dans la capitale helvète ; habituellement je défiscalise en Suisse entre 20 et 30 personnes par an dont la moitié est originaire de France. Depuis le début du mois de janvier, j’ai eu une quinzaine de demandes de la part de contribuables français’. La plupart du temps, il s’agit de patrons d’entreprises. A chaque fois, leur motivation tient en trois mots : payer moins d’impôts (…) Les déclarations de François Hollande (prévoyant une tranche à 75% pour les revenus supérieurs à 1 million d’euros) ont eu un effet déclencheur. »
On est en droit de s’ étonner que nos hommes politiques ne cherchent pas de parades juridiques ou fiscales à cette évasion de nos capitaux et de nos talents. Et que non seulement ils ne cherchent pas de parades mais semblent cautionner cette logique de gain prévalant sur la logique de solidarité. Personne ne trouve rien à redire au fait que le chef de l’Etat ait demandé à un artiste ô combien célèbre de représenter la France en Chine alors que celui-ci réside en Suisse pour payer moins d’impôts…Pire encore, la seule parade que trouvent nos hommes politiques pour dissuader ces privilégiés de partir à l’étranger ce sont des cadeaux fiscaux (bouclier fiscal et autres…) qui ne font qu’aggraver l’écart entre les plus riches et les pauvres.

Quand comprendrons-nous que cette délinquance qui ne dit pas son nom et a des conséquences graves sur la marche de notre pays doit être combattue au même titre que celle liée aux entorses à la loi ?

mardi 6 mars 2012

La vraie fausse idée de François Hollande



Depuis 2002, 750 000 emplois industriels ont disparu, soit 1 emploi sur 6. Sur ces trois dernières années, près de 900 usines ont fermé et quelque
100 000 emplois ont été détruits en France. Et 2012 ne s’annonce pas mieux.

Pour lutter contre cette désindustrialisation François Hollande a eu l’idée de déposer un projet de loi qui obligerait les entreprises concernées par la fermeture d’un site à en informer le tribunal de commerce qui mandaterait une personne pour rechercher des offres de reprises en lien avec l’entreprise cédante. Si l’entreprise refusait ces offres le tribunal pourrait imposer un plan de cession pour la reprise du site en question. Cette idée, François Hollande l’a proposée aux syndicalistes des hauts fourneaux de Lorraine devant l’usine bloquée d’ArcelorMittal à Florange.

Cette proposition part d’une bonne intention mais ne serait qu’une loi de plus pour mettre la pression sur les entreprises. Et même si toutes ces lois – sur le temps de travail, les salaires, les conditions de travail et maintenant les reprises d’entreprises – ont pour but de protéger les salariés contre des abus, cela ne doit pas nous empêcher de comprendre que la meilleure façon de les protéger serait peut-être de leur donner plus de pouvoir. Déjà celui de participer à l’élection de leur patron, et puis d’un droit de veto pour les investissements, les délocalisations, les licenciements… Cela ne serait-il pas plus efficace pour la défense et la dignité de ces salariés ? Sachons desserrer l’étau extérieur de plus en plus contraignant pour l’entreprise et frein pour son développement. Laissons cette entreprise respirer !
                     
Le seul véritable pouvoir qu’ont les salariés est un droit de violence : le droit de grève. Ils sont pourtant les mieux placés et les premiers concernés pour donner leur avis sur la stratégie de l’entreprise ; même s’il y a parmi eux des éléments toujours négatifs qui s’opposeront systématiquement à tout changement, faisons le pari que la majorité des salariés sont des gens raisonnables qui peuvent comprendre que la compétition existe, que le monde évolue, que la technologie évolue, que les besoins et attentes des personnes évoluent et font que l’entreprise est appelée elle aussi à évoluer : on n’est plus au temps des diligences ! C’est tout simplement faire confiance et croire en l’Homme, pierre angulaire de la démocratie.
Certains esprits chagrins pensent que ce pouvoir donné aux salariés peut être un frein à la bonne réussite et au développement d’une entreprise… Mais qu’est-ce que la réussite si elle passe par de mauvaises conditions de travail, des délocalisations et des licenciement brutaux ? Ce que l’on perdra en terme d’efficacité financière on le gagnera en terme de qualité de vie, de travail et de  dignité de l’homme. L’enjeu n’est-il pas en effet de mettre l’entreprise au service de l’homme et non l’homme au service de l’entreprise ?

lundi 27 février 2012

Une bonne idée du candidat Nicolas Sarkozy



Dans cette campagne électorale pour la présidentielle, depuis que Nicolas Sarkozy s’est officiellement déclaré comme candidat, chaque jour on a droit à de nouvelles propositions : référendum sur le chômage, dose de proportionnelle dans les élections législatives, augmentation de 1000 € par an pour 7 millions de français, suppression des retraites chapeau et des parachutes dorés…  Parmi ces propositions - toutes fort intéressantes même si elles suscitent débat et controverse – Nicolas Sarkozy a proposé, pour mettre fin à l’escalade indécente des rémunérations des grands patrons, que celles-ci soient votées à l’assemblée générale des actionnaires comme c’est déjà le cas en Allemagne, en Belgique, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis ; quand on sait que les salaires des patrons du CAC 40 ont augmenté de 34% ces dernières années et qu’ils tournent autour de 1 à 10 M€ par an, cette proposition originale ne peut avoir qu’un accueil favorable de toutes parts.

Mais pourquoi limiter ce contrôle uniquement aux actionnaires ? Pourquoi ne pas l’étendre aux salariés ou à leurs représentants ? N’est-ce pas de la discrimination sociale ?
Est-ce lié à leur statut de salarié ? Dans ce cas-là les salariés qui sont aussi actionnaires dans leur entreprise (le cas de Bouygues ou Auchan entre autres) n’auraient pas le droit de vote sous prétexte qu’ils sont salariés.
Est-ce parce que les salariés seraient moins responsables, moins compétents ? Pourtant ce sont les mêmes qui sont appelés à voter pour choisir leur Président.
Est-ce parce que les salariés seraient partisans dans leurs avis et pas objectifs dans leurs choix ? Détrompons-nous ! Les salariés savent qu’il y a aussi un marché du travail pour les patrons et que s’ils veulent avoir le meilleur ils doivent s’en donner les moyens. Tout le monde le comprend dans le sport par exemple pour les équipes de foot ou de rugby.
Est-ce parce que les actionnaires sont seuls à risquer leur capital ? Mais les salariés risquent beaucoup plus ! Leur emploi ! Et en cas de crise ils sont malheureusement en première ligne.

En fait, le seul frein à ce que les salariés aient leur mot à dire pour la rémunération de leur patron, ce sont nos a priori. Quand comprendrons-nous que le monde a évolué et que le temps des esclaves et des sujets est fini. Les salariés sont à même de comprendre et de donner leur avis sur la rémunération de leur patron ; ce serait la première étape, la première marche, pour l’élection du patron conjointement par les salariés et par les actionnaires dans les entreprises (cf. billet n°1 de ce Blog ).

vendredi 24 février 2012

Du rififi chez Veolia


Dans cette campagne présidentielle les changements économiques prennent tout de suite une dimension politique et prêtent à polémique. On a pu le voir avec les entreprises Lejaby et Photowatt, on le vit maintenant avec l’entreprise Arcelor Mittal sur le site de Gandrange.

Mais ce qui fait aujourd’hui la une des journaux serait l’éventuelle nomination de l’ancien ministre de l’écologie, Jean-Louis Borloo, à la tête du Groupe Veolia en échange de sa renonciation à  sa candidature à l’élection présidentielle et de son ralliement à Nicolas Sarkozy. C’est ce que disent les adversaires du Président sortant ; mais rien n’est prouvé en la matière…

Ce qui est plus inquiétant, ce sont les manœuvres de Henri Proglio PDG d’EDF et ancien PDG de Veolia, pour « débarquer » Antoine Frérot l’actuel PDG de Veolia sous prétexte de sa gestion catastrophique et de la perte de quelques 400 M d’€  en 2011 (cf. Le Monde 21.02.12). Pour la destitution d’Antoine Frérot Henri Proglio, administrateur dans la Société Veolia, n’a pas hésité à agir en coulisses pour convaincre plusieurs de ses collègues administrateurs – et pas des moindres : Costa de Beauregard qui représente la famille Dassault, Philippe Kourilsky professeur au Collège de France, Serge Michel patron de la société de conseil Soficot, Louis Schweitzer ex PDG de Renault - pour les persuader de faire ce « coup d’état » à la tête de Veolia. Il n’en est pas à son coup d’essai : Anne Lauvergeon ex PDG d’ Areva en a fait les frais.

Sans entrer dans les dessous de cette affaire, quel est le mobile réel d’ Henri Proglio ? En quoi Nicolas Sarkozy  a-t-il suggéré voire influencé cette promotion de Jean-Louis Borloo ? On ne le saura certainement jamais !

Ce qui est étonnant c’est que dans une entreprise comme Veolia qui emploie plus  300 000 collaborateurs à travers le monde dont 100 000 en France, seulement quelques personnes mandatées uniquement par les actionnaires puissent décider quel sera le nouveau patron sans demander l’avis des collaborateurs qui sont pourtant les premiers concernés par ce changement.

Dans cette campagne électorale, de l’extrême droite à l’extrême gauche, on n’entend personne s’élever contre le fait que quelques hommes puissent décider du sort de Veolia. Pourtant, il serait de l’intérêt des salariés de Veolia et des actionnaires que chaque prétendant puisse exposer son programme et faire preuve de pédagogie pour expliquer les enjeux de Veolia. Cela s’appelle tout simplement de la démocratie (cf. billet n°1 de ce blog). Chaque jour des gens meurent pour le droit de vote ! Quand comprendrons-nous que le salarié est aussi citoyen économique et que dans son entreprise il ne doit pas être considéré seulement comme un sujet mais comme un acteur à part entière ?

mercredi 15 février 2012

Haro sur Renault


La classe politique est unanime, de Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen en passant par Nicolas Sarkozy, on a trouvé les responsables de tous nos maux : chômage, délocalisations, bas salaires…. C’est la faute aux pays en voie de développement (PVD)et à fortiori des pays dits pauvres où des gens acceptent de travailler pour 2 € par jour plutôt que de mourir de faim.
On a pu le mesurer à l’occasion de l’inauguration de l’usine Renault à Melloussa près du port de Tanger au Maroc, cette usine qui va créer 6 000 emplois et 30 000 chez les sous-traitants et dont l’objection est de produire de 150 à 170 000 mono-space low-cost Lodgy et le double dès 2013 avec l’installation d’une deuxième chaîne de montage.
Les réactions ont été très vives : Christian Estrosi député UMP des Alpes-Maritimes et ancien ministre de l’industrie « je suis scandalisé ; cette affaire est une provocation » ; Gérard Larcher ancien président du sénat a rappelé à Carlos Ghosn sa responsabilité sociétale ; Bruno Le Roux, porte parole du PS, a pointé la défaillance dans ce dossier de l’Etat actionnaire à 15% de Renault ; plus virulent, Arnaud Montebourg a fustigé une « prime à la casse de l’industrie française » ; les syndicats ne sont pas en reste : Fabien Gache délégué CGT de Renault dénonce un moyen de pression considérable sur les salariés français. Le Maroc et tous les PVD sont unanimement accusés de faire du dumping social. Mais à bien y réfléchir, ne faisons-nous pas aussi du dumping technologique ? Sous prétexte de maîtriser la science et la technologie n’imposons-nous pas aux pays pauvres notre dictat économique ? Le jeu est inégal : d’un côté les PVD n’ont pour argument que leurs salaires de misères et de l’autre les entreprises qui maîtrisent  les technologies de pointe. C’est Pascal Lamy, Directeur Général de l’OMC, qui a dit que « le colonialisme n’est pas terminé, il est maintenant sous d’autres formes ».

Quand comprendrons-nous qu’il est de notre intérêt de donner du travail à ces pays pauvres ? Il en va de notre dignité et de leur dignité et de la Paix dans le monde. Le terreau du terrorisme, c’est la pauvreté. Au risque de provoquer je dis tant mieux si Renault a permis de créer plus de 30 000 emplois au Maroc ; cela est préférable à une vague d’immigration que nous sommes incapables de gérer. Et je trouverais tout à fait normal que Michelin par exemple ait un site de fabrication de pneumatiques en Afrique d’où il tire l’essentiel de sa matière première : le caoutchouc.

Et si le remède à nos maux (chômage, délocalisations, bas salaires…) était un partage plus équitable des richesses ? Il y aurait largement de quoi indemniser les 4 millions de chômeurs que compte la  France. Ce n’est malheureusement pas dans ce sens que nous allons puisque Nicolas Sarkozy nous promet un référendum pour revoir les modalités d’indemnisation des chômeurs qui sont à son avis trop laxistes…


mardi 7 février 2012

Les dessous de Lejaby


On a appris avec plaisir et surprise que les 93 ouvrières du site Lejaby à Yssenjeau, même si elles n’ont pas pu sauver leur métier, avaient réussi à sauver leur emploi. Elles ont en effet été reprises par la société de maroquinerie Sofama (200 salariés) implantée dans l’Allier et dirigée par Vincent Raberin.  Grâce entre autres à l’intervention de Nicolas Sarkozy, Laurent Wauquier ministre de l’enseignement supérieur, enfant du pays et, plus surprenant, grâce à l’intervention de  Bernard Arnault proche du chef de l’Etat, PDG de LVMH maison mère de Louis Vuitton et 4ème fortune au monde. On ne peut que se réjouir de cette bonne nouvelle tout en regrettant que les 350 autres salariés de Lejaby licenciés ou en passe de l’être sur les sites de Rillieux-La-Pape (Rhône), Bellegarde (Ain), Bourg-en-Bresse (Ain) et Le Teil (Ardèche) n’aient pas eu la même chance.

Ce sauvetage très médiatisé soulève bien des questions…
Quelle a été la part de calcul et de gratuité dans l’initiative du chef de l’Etat ? Aurait-il fait la même chose hors période électorale ?
Pourquoi après avoir été reçue à l’Elysée la délégation des ouvrières de Lejaby Issenjeau l’a-t-elle aussi été par Bernard Arnault dans la très chic avenue Montaigne ? Cela signifie-t-il que  son intervention ne s’est pas limitée à garantir à Vincent Raberin l’ engagement de Louis Vuitton sur un carnet de commandes dans la durée mais a dépassé cette simple garantie ?
Dans cet engagement, Bernard Arnault qui donne quand-même du travail à 93 ouvrières, ne va-t-il pas « déshabiller » l’un de se fournisseurs pour « habiller » l’autre ? Ou bien cette garantie – ce qui serait surprenant - porte-telle uniquement sur un surcroît de ventes de Louis Vuitton ?
Quel soutien financier ou aides diverses l’Etat a-t-il apportés à la Société Sofama pour reprendre les 93 ouvrières ? Et si soutien il y a va-t-il à l’encontre de toutes les règles contre le dumping (concurrence déloyale) sur lesquelles Bruxelles est très pointilleuse pour que les Etats n’apportent pas de soutiens indus aux entreprises.
Enfin, Nicolas Sarkozy et Bernard Arnault ont-ils passé un « deal » dans cette affaire ? Et si oui, lequel ?

Cependant, restons positifs ! Même si ce sauvetage présente quelques facettes obscures, réjouissons-nous que 93 emplois aient été sauvés tout en regrettant qu’une marque comme Lejaby puisse mourir et pareil savoir-faire disparaître. Il y avait certainement d’autres solutions – entre autres la création d’une Scop – mais aussi urgence en la matière ! Cela nous laisse tout de même l’impression d’un immense gâchis.

 



lundi 30 janvier 2012

La dévaluation de l’euro, starter de la croissance

  
La crise économique, le déficit budgétaire et la croissance deviennent des thèmes majeurs dans cette campagne présidentielle. Certains candidats préconisent la sortie de l’euro et tous ont des recettes pour réduire le déficit ou relancer la croissance et pour que l’Etat fasse des économies tout azimut.

Et pourquoi ne propose-t-on pas la dévaluation de l’euro en permettant à la Banque Centrale Européenne (BCE) de faire marcher la planche à billets ?
J’y vois pourtant plusieurs avantages :
 □ la réduction de nos dettes pour celles exprimées en euro
 □l’augmentation des salaires condition d’une relance de la croissance ; dans ce scénario notre compétitivité ne tiendrait plus à des salaires bas mais à une baisse de l’euro
 □ la relance de nos exportations : nos produits seraient moins chers exprimés en euro. 
Seul inconvénient qui est cependant de taille : l’augmentation du coût de nos importations libellées en dollars comme c’est le cas pour le pétrole.

C’est pourtant ce que font régulièrement les Américains en émettant des dollars, une dévaluation qui ne dit pas son nom, ce que font indirectement les Chinois qui refusent toute réévaluation de leur yuan, ce qu’a fait la France après les accords de Grenelle de mai 68 qui prévoyait une augmentation du SMIG de 35%.

Alors, pourquoi tous ces a priori pour dévaluer l’euro ?
Pour plusieurs raisons :
  □ la réticence  de l’Allemagne qui a tout intérêt à garder un euro fort compte tenu que sa balance commerciale est positive (+ 150 Mds) alors que celle de la France est négative (- 75 Mds).
  □ l’amour-propre mal placé des européens ; à commencer par la France  qui considère la dévaluation de l’euro comme un échec, à juste titre d’ailleurs, parce qu’elle équivaut à une mauvaise gestion du budget national.

N’oublions pas que l’entêtement des uns et des autres peut nous conduire à l’éclatement de la zone euro et plonger dans la misère des pays comme la Grèce, l’Italie, l’Espagne ou le Portugal… La dévaluation, c’est comme le starter d’une voiture : une fois que le moteur a trouvé son régime, il faut vite l’enlever. La maîtrise de l’inflation est capitale pour une économie saine.

 



lundi 23 janvier 2012

Le Front de Gauche et le CAC 40


Dans le contexte des futures élections présidentielles l’ émission « Des paroles et des actes » prend un relief tout particulier. Le jeudi 12 janvier dernier David PUJADAS avait invité Jean-Luc MELENCHON (JLM) pour qu’il présente son programme et réponde aux questions des journalistes et autres personnalités dont Jean-Louis BEFFA (JLB) ancien patron de Saint Gobain et qui vient de publier « La France doit choisir » aux éditions Seuil.

On attendait impatiemment cette confrontation car apparemment tout opposait ces deux hommes et la rencontre risquait d’être houleuse. Mais à la surprise générale autant les débats précédents avec les journalistes avaient été agressifs autant cet échange a été consensuel.
Les deux hommes ont reconnu  que la crise économique que nous vivons est une crise du capitalisme avec sa dérive financière. Les deux hommes ont également reconnu que le pouvoir absolu des actionnaires était la cause de cette dérive financière et qu’il était urgent de modifier le fonctionnement de l’entreprise pour ne pas la laisser aux seules mains des actionnaires :
JLM : « il faut arracher l’entreprise aux griffes de la finance (…) briser le pouvoir des actionnaires qui est excessif »
JLB : « Je suis d’accord pour refaire le système (…) Je suis contre un modèle libéral financier dans lequel un des dogmes est la primauté absolue des actionnaires (…) je suis pour un modèle différent qui replace le pouvoir au centre du conseil d’administration »
Par contre tous les deux avaient des divergences sur les remèdes à appliquer pour mettre un bémol au pouvoir des actionnaires.
JLM propose entre autres le développement de la propriété sociale par les coopératives ouvrières et une loi donnant la préemption aux travailleurs sur leur outil de travail lorsque le propriétaire veut vendre son entreprise.
JLB propose entre autres la présence d’élus des salariés et des confédérations syndicales au conseil d’administration.

On peut tirer trois conclusions de ce débat fort intéressant.
D’abord, qu’il y a unanimité dans la classe politique - toutes tendances confondues - pour affirmer l’origine financière de la crise.
Ensuite qu’il est urgent de modérer le pouvoir des actionnaires dans l’entreprise.
Enfin qu’il y a une absence totale de réponse à ce problème du pouvoir dans l’entreprise.
On peut au passage remarquer que sur les deux heures de débat avec JLM seulement cinq minutes ont été consacrées à la relation actionnaires-salariés dans l’entreprise et que personne  n’a évoqué la nécessité de l’égalité de droits et de devoirs des actionnaires et des salariés ni, bien sûr, la démocratie dans l’entreprise ! A travers cette remarque on mesure l’urgence de remettre en question le pouvoir des actionnaires et briser ce tabou et d’ envisager la démocratie dans l’entreprise !

  

mardi 17 janvier 2012

La réforme de l’entreprise : sujet tabou


A trois mois des présidentielles, les hommes politiques s’agitent, à droite comme à gauche. On parle bien sûr de la crise, de l’économie, de la finance, de la spéculation, de la fiscalité, du chômage, des inégalités croissantes, de la pauvreté... Mais jamais de l’Entreprise et encore moins de sa réforme.

Pourtant, l’entreprise est la cellule de base de l’économie. C’est au niveau de l’entreprise que sont prises la plupart des décisions concernant le bien-être des français : embauches, conditions de travail, montant des salaires, délocalisations, licenciements, … Or, toutes ces décisions sont prises par une personne mandatée par les actionnaires dont la principale motivation est le retour sur investissements et qui, avant tout, privilégient leurs intérêts. Aucun homme politique ne dénonce cette entorse énorme aux droits de l’homme, au bon sens, comme en son temps on avait banalisé l’esclavage, le vote censitaire... On trouvait normal qu’on puisse vendre des hommes et des femmes, que seules les personnes nanties puissent voter . On trouve aujourd’hui normal que les hommes et les femmes qui font la richesse de l’entreprise, y passent la moitié de leur vie active, en tirent 90% de leur qualité de vie (stabilité de l’emploi, rémunération, ambiance) ne soient pas citoyens dans l’entreprise.

On se bat dans la monde pour le droit de vote, la liberté. Quand nos hommes politiques comprendront-ils qu’il est aussi urgent de se battre pour la démocratie dans l’entreprise  et que la réforme de l’entreprise n’est pas un sujet tabou ?

La refondation du capitalisme que tout le monde appelle de ses vœux tant à droite qu’à gauche passe par la réforme de l’entreprise.
Vous qui lirez ce billet, faites-le circuler autour de vous, auprès de vos élus, de vos amis et tous ceux qui espèrent un monde nouveau où l’homme ne sera pas un moyen mais une finalité. L’homme n’est pas fait pour l’entreprise, c’est l’entreprise qui est faite pour l’homme.

mardi 10 janvier 2012

Le labyrinthe de Sarkozy


Dans le JDD du 1er janvier on lit que « Nicolas Sarkozy gère tout à l’affect. La contrepartie de l’affect c’est la brutalité ».  La phrase est signée Henri Guaino, le conseiller spécial du Président, qui essaye de fournir une explication au mode de fonctionnement du chef de l’Etat. C’est aussi l’une des confidences rapportée par le journaliste Eric Mandonnet dans son livre « Président candidat » (l’Express). L’auteur tente dans un récit de la présidence Sarkozy, de dénouer les fils d’un quinquennat en forme de labyrinthe .
Au risque de contredire Henri Guaino, le contraire de l’affect, ce n’est pas la brutalité mais le discernement, l’objectivité, le courage. L’affect a un lien direct avec nos émotions et lorsqu’un chef d’entreprise ou un responsable politique gère à l’affect et que son moteur est l’émotion, c’est la porte ouverte à toutes les dérives, la colère non contrôlée, la recherche du pouvoir, le copinage, l’inconstance dans les décisions, les privilèges abusifs, les sautes d’humeur… Ce n’est pas celui qui fait pitié qui aura forcément raison et ce n’est pas celui qui sera antipathique qui aura forcément tort. Bien sûr nos émotions – qu’on peut appeler sensibilité - sont importantes en tant que moyens, elles nous permettent de recevoir des messages et d’en faire passer mais en aucun cas elles doivent être le moteur de nos décisions.
Lorsque j’entends une personne célèbre se battre pour protéger les phoques sur la banquise – ce qui est louable – et en même temps afficher son racisme, je me dis qu’elle est dans la sensiblerie.
Il est bien d’avoir un potentiel d’émotion ; celui qui n’en a pas sera dans le cynisme, la cruauté, la lâcheté. Mais nos émotions ne doivent pas être moteur de nos actions, de nos pensées ou de nos paroles. Une personne qui vivrait dans la peur de l’accident ou de l’échec n’oserait ni conduire ni entreprendre. Mais si la peur lui est un moyen, elle sera prudente.  La colère est une bonne chose si elle est maîtrisée sinon on sera dans l’insulte, le mépris. Il est bien connu qu’un chirurgien n’opère jamais un membre de sa famille parce qu’il a une relation affective avec lui.
Un chef d’entreprise ou un homme politique dont l’émotion est moyen et non  moteur sera dans le discernement, la sérénité, la paix… Il gèrera les conflits sans implication affective en mettant son amour propre de côté. Il évitera d’avoir une « cour » autour de lui avec ses « chouchous ». Il évitera de placer un membre de sa famille ou un ami à des postes de responsabilité s’il n’en a pas les compétences, il relativisera les faits divers...
Je terminerai en faisant référence au premier testament de la Bible dans le premier livre des rois, chapitre trois : Salomon est appelé à arbitrer à laquelle de deux femmes appartient un enfant. S’il avait été dans l’affect il l’aurait donné à celle qui avait le plus de chagrin et n’aurait certainement pas eu le courage de menacer de couper en deux le bébé pour identifier la vraie mère. Nos émotions sont la meilleure et la pire des choses. La meilleure quand elles sont moyen et la pire lorsqu’elles sont moteur ; un manager qui conduit ses hommes à l’affect aura un très lourd handicap et d’autant plus lourd qu’il n’a pas conscience de son dysfonctionnement et a le sentiment d’être animé des meilleures intentions pour son équipe.

Bienvenue !

Le 4 avril 2009 à Londres se sont réunis les chefs d'état des pays les plus riches de la planète : le G20. L'ambition affichée était de refonder le capitalisme (cf. N. Sarkozy). En fait de refondation, nous avons eu droit à un ravalement. On connaissait le bluewashing, le greenwashing, maintenant nous connaissons le whitewashing.
Le G20 a montré du doigt les paradis fiscaux et a remis en question les bonus des patrons. Mais nous l'avons bien compris : rien de fondamental pour le capitalisme dont la pierre angulaire est la loi du plus fort.
Il y a donc urgence à faire émerger des idées concrètes pour refonder le capitalisme et donner de l'espoir à ceux qui se refusent politiquement parlant d'avoir à choisir entre une droite qui fait allégeance complète au capitalisme, une gauche en panne d'imagination et une ultragauche en pleine utopie.
Voilà tout l'objet de ce blog : exprimer des idées, réagir, commenter ...