mardi 16 novembre 2010

De Gaulle … son œuvre inachevée


A l’occasion du quarantième anniversaire de la mort du Général de Gaulle tous les médias (TV, radios, presse écrite…) ont été prolixes en reportages sur sa vie. Bien sûr, on a parlé de l’homme du 18 juin, du fondateur de la cinquième république, du décolonisateur, du père de la bombe atomique française et de l’industrialisation de la France. Mais on n’a jamais ou très peu parlé de l’homme de la Participation. Pourtant, là-dessus, le Général de Gaulle avait une réelle vision. Toute sa vie il cherchera à trouver un système nouveau, une « troisième voie » entre le capitalisme et le communisme.

Déjà, en 1948, dans un discours prononcé à Marseille le 17 avril, on peut lire « Oui ! L’association qui placera dans l’entreprise sur le même plan de dignité tous ceux qui contribuent à l’œuvre économique commune, fera que l’ingénieur, l’agent technique, l’ouvrier, l’employé, à tout échelon, seront des sociétaires, et fera du patron aux yeux de son personnel, non point l’homme qui paie, mais le chef, dont la valeur, l’indépendance, l’autorité sont nécessaires à l’avantage de tous »

Remarquons qu’à l’époque De Gaulle ne parlait pas de participation mais d’association.

Puis, le 1er mai 1950, dans un discours prononcé sur la pelouse de Bagatelle, voilà ce que dit le Général :
« Un jour, la machine apparut. Le capital l’a épousée. Le couple a pris possession du monde. Dès lors, beaucoup d’hommes, surtout les ouvriers, sont tombés sous sa dépendance. Liés aux machines quant à leur travail, au patron quant à leur salaire : ils se sentent moralement réduits et matériellement menacés. Et voilà la lutte des classes ! Elle est partout, aux ateliers, aux champs, aux bureaux, dans la rue, au fond des yeux et dans les âmes, elle empoisonne les rapports humains, affole les Etats, brise l’unité des nations, fomente les guerres. Car c’est bien la question sociale, toujours posée, jamais résolue, qui est à l’origine des grandes secousses subies depuis trente cinq ans. Aujourd’hui, c’est la même question toujours posée, jamais résolue, qui pousse le monde vers un drame nouveau ».

Ces propos sont toujours d’actualité en 2010.

Et enfin le 07 juin 1968, lors d’un entretien radiodiffusé et télévisé avec Michel Droit, voilà ce qu’on peut relever « … L’ouvrier n’a pas pris sur son propre destin, comme pour les fourmis la fourmilière et pour les termites la termitière. Naturellement, ce sont les régimes communistes qui en viennent là surtout et qui encagent tout un chacun dans un totalitarisme lugubre. Mais le capitalisme lui aussi, d’une autre façon, sous d’autres formes, empoigne et asservit les gens. Comment trouver un équilibre humain pour la civilisation, pour la société mécanique moderne ? Voilà la grande question de ce siècle !
(…) Le capitalisme dit : grâce au profit qui suscite l’initiative, fabriquons de plus en plus de richesses qui, en se répartissant par le libre marché, élèvent en somme le niveau du corps social tout entier. Seulement voilà : la propriété, la direction, le bénéfice de l’entreprise dans le système capitaliste n’appartiennent qu’au capital. Alors, ceux qui ne le possèdent pas se trouvent dans un état d’aliénation à l’intérieur même de l’activité à laquelle ils contribuent. Non, le capitalisme du point de vue de l’homme ne trouve pas de solution satisfaisante.
Il y a une troisième solution : c’est la Participation qui, elle, change la condition de l’homme au milieu de la civilisation moderne. Dès lors que des gens se mettent ensemble pour une œuvre économique commune, par exemple, pour faire marcher une industrie, en apportant soit les capitaux nécessaires, soit la capacité de direction, de gestion et de technique, soit le travail, il s’agit que tous forment ensemble une société, une société où tous aient intérêt à son rendement et à son fonctionnement et un intérêt direct. Cela implique que soit attribuée par la loi à chacun, une part de ce que l’affaire gagne et de ce qu’elle investit en elle-même grâce à ses gains. Cela implique aussi que tous soient informés d’une manière suffisante de la marche de l’entreprise et puisse, par des représentants qu’ils auront tous nommés librement, participer à la société et à ses conseils pour y faire valoir leurs intérêts, leurs points de vue et leurs propositions. C’est la voie que j’ai toujours cru bonne. C’est la voie dans laquelle j’ai fait déjà quelques pas ; par exemple en 1945, quand, avec mon gouvernement, j’ai institué les comités d’entreprises, quand, en 1959 et en 1967, j’ai, par des ordonnances, ouvert la brèche à l’intéressement. C’est la voie dans laquelle il faut marcher.
(…)
M. Michel Droit :
Oui ! Mais alors, mon Général, il y a vraiment une question qu'on a envie de vous poser. Cette Participation à laquelle vous tenez tant, pour laquelle vous avez tellement milité déjà, pourquoi est-ce que vous ne l'avez pas faite plus tôt ?
Le Général de Gaulle :
Parce qu'une pareille réforme, personne et moi non plus ne peut la faire tout seul. Il faut qu'elle soit suffisamment consentie et il faut que les circonstances s'y prêtent. Alors, c'est vrai, malgré les quelques pas que j'ai pu faire dans cette direction, jusqu'à présent, nos structures et nos milieux, et en particulier ceux du travail, ont résisté à ce changement-là. Seulement, il y a eu maintenant une secousse et une secousse terrible (Mai 1968 - NDLR) qui a dû ouvrir les yeux de beaucoup de monde. Si bien que parce que c'est juste, parce que c'est vital et parce que maintenant, grâce à cette secousse, les circonstances s'y prêtent, on doit pouvoir marcher carrément dans cette voie-là; il faut le faire, quant à moi, j'y suis très résolu.
M. Michel Droit :
Mon Général, vous venez de dire que certains milieux et notamment ceux du travail s'étaient toujours opposés à la Participation. Il est vrai que les travailleurs ou, tout au moins, ceux qui parlent en leur nom ont toujours plus ou moins considéré que la Participation dont vous parlez c'était du vent, c'était du bluff - si vous voulez bien excuser l'expression -. Or, telle que vous la définissez on a l'impression que pour vous c'est au contraire une sorte de révolution. Dès lors on se demande tout de suite: la Participation, est-ce que c'est du vent ? Est-ce que c'est du bluff ? Ou est-ce que c'est vraiment une révolution ?
Le Général de Gaulle :
Si une révolution, ce sont des exhibitions et des tumultes bruyants, scandaleux et, pour finir, sanglants, alors non ! La Participation, ce n'est pas une révolution. Mais si une révolution consiste à changer profondément ce qui est, notamment en ce qui concerne la dignité et la condition ouvrières, alors, certainement, c'en est une. Et moi, je ne suis pas gêné dans ce sens-la d'être un révolutionnaire comme je l'ai été si souvent» .

Malheureusement le non au référendum de 1969 a mis un point final à ce beau dessein. Sachons reprendre le flambeau. Plus que jamais cette ambition de Participation est d’actualité. Il en est de notre devoir. Cela passera par la refondation du capitalisme.






Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Bienvenue !

Le 4 avril 2009 à Londres se sont réunis les chefs d'état des pays les plus riches de la planète : le G20. L'ambition affichée était de refonder le capitalisme (cf. N. Sarkozy). En fait de refondation, nous avons eu droit à un ravalement. On connaissait le bluewashing, le greenwashing, maintenant nous connaissons le whitewashing.
Le G20 a montré du doigt les paradis fiscaux et a remis en question les bonus des patrons. Mais nous l'avons bien compris : rien de fondamental pour le capitalisme dont la pierre angulaire est la loi du plus fort.
Il y a donc urgence à faire émerger des idées concrètes pour refonder le capitalisme et donner de l'espoir à ceux qui se refusent politiquement parlant d'avoir à choisir entre une droite qui fait allégeance complète au capitalisme, une gauche en panne d'imagination et une ultragauche en pleine utopie.
Voilà tout l'objet de ce blog : exprimer des idées, réagir, commenter ...